LES NOMBREUX CHANGEMENTS APPORTES PAR LA LOI REBSAMEN EN MATIERE SOCIALELa loi relative au dialogue social et à l’emploi a été publiée au JO le 18 août 2015. C’est la loi dite Rebsamen. Elle vise à moderniser le dialogue social en modifiant les règles de fonctionnement et d’organisation des entreprises. Divers sujets sociaux sont traités dans cette loi : les instances représentatives du personnel, les contrats de travail, la santé des salariés, la pénibilité au travail.L’entrée en vigueur de la loi s’est faite le 19 août mais de nombreuses mesures ne s’appliqueront qu’en 2016 et d’autres après la publication des décrets nécessaires.Les changements relatifs aux représentants du personnelLes relations entre l’employeur et les représentants du personnel sont profondément modifiées par la loi, de même que le fonctionnement des différentes instances.Les principales nouveautés sont :
- Ajout du CHSCT à la délégation unique du personnel (DUP). CHSCT, CE et délégués du personnel seront donc rassemblés dans une délégation unique. Chaque instance gardant ses propres règles. Les réunions se concentreront autour d’un seul ordre du jour. La DUP en tiendra 6 par an dont au moins 4 sur des thématiques relevant du CHSCT.
- Extension de la DUP : la DUP existe depuis 1993 dans les entreprises de 50 à 200 salariés. Ce principe est étendu à 300 salariés. Ainsi, les entreprises de 50 à 300 salariés pourront fusionner les délégués du personnel, le CE et le CHSCT en une nouvelle DUP. L’employeur prend cette décision après avoir consulté les délégués du personnel, et s’ils existent le CE et le CHSCT. Ce choix est possible lors de la constitution ou du renouvellement de l’une de ces 3 institutions.
Au-delà d’un effectif de 300 salariés, le recours à la DUP est toujours impossible. Par contre, il est possible de conclure un accord avec certaines organisations syndicales représentatives pour regrouper les DP, le CE et le CHSCT ou juste deux de ces institutions.
- Le CHSCT est modifié : il doit se doter d’un règlement intérieur, la durée du mandat de ses membres est modifiée, il se verra fixé un délai d’examen pour rendre ses avis.La mise en place du CHSCT s’impose aux entreprises d’au moins 50 salariés ou si tous les établissements font moins de 50 salariés, dans au moins l’un d’entre eux.Dans les établissements de moins de 50 salariés, les DP exercent les missions du CHSCT.Le CHSCT a désormais l’obligation de se doter d’un règlement intérieur qui détermine les modalités de son fonctionnement et l’organisation de ses travaux.Les membres du CHSCT auront désormais un mandat aligné sur le mandat des membres élus du CE soit en principe 4 ans au lieu de 2.
- Mise en place dans les entreprises de moins de 11 salariés de commissions paritaires régionales interprofessionnelles (CPRI) qui auront un rôle d’information et de conseil mais aussi de médiation et de discussion. Elles seront composées de 20 membres représentants syndicaux et patronaux. Ils bénéficieront de crédits d’heures de délégation de 5 heures par mois et les salariés qui y siègeront obtiendront le statut de salarié protégé. (Entrée en vigueur de cette mesure le 1er janvier 2017)
- A partir de janvier 2016, afin d’assouplir le système, regroupement des 17 obligations récurrentes d’information-consultation du CE en 3 grandes thématiques : temps de travail et rémunération, égalité professionnelle et qualité de vie au travail, gestion des emplois, et les 12 obligations de négocier en 3 grands sujets de négociations concernant l’entreprise : orientations stratégiques, situation économique et conditions de travail.
- La loi prévoit le renforcement des droits pour les représentants du personnel. Ils effectueront à leur demande d’un entretien individuel avec leur employeur lors du début de leur mandat et à la fin de celui-ci. Ces entretiens ne remplacent pas l’entretien professionnel obligatoire au moins tous les 2 ans.
Ceux dont les heures de délégation sur l’année dépassent 30% de leur temps de travail bénéficient d’une nouvelle garantie en matière de rémunération afin d’éviter toute forme de discrimination salariale. Ainsi, ils ont droit à une évolution de leur rémunération au moins égale à l’évolution moyenne des rémunérations des salariés de leur catégorie professionnelle et d’ancienneté comparable ou à défaut de l’évolution moyenne des rémunérations de l’entreprise.
- Les réunions entre représentants du personnel et des membres du CE pourront se faire par visioconférence par accord entre l’employeur et les membres élus du comité ou à défaut d’accord 3 fois par an.
La même règle s’applique pour d’autres institutions notamment le CHSCT.
- Certains seuils d’effectif liés au CE ont été aménagés.
La mise en place d’un CE devient obligatoire lorsque l’entreprise atteint le seuil d’au moins 50 salariés pendant 12 mois, consécutifs ou non, au cours des 3 dernières années. Avec la loi Rebsamen, l’entreprise dispose d’un an à compter du franchissement du seuil.Lorsque le seuil de 50 salariés n’aura pas été atteint pendant 24 mois, consécutifs ou non, au cours des 3 années précédant la date de renouvellement du CE, l’employeur peut décider de supprimer le CE.Le CE doit être réuni au moins une fois par mois dans les entreprises d’au moins 150 salariés. Ce seuil par la loi est porté à 300. Dans les autres cas, tous les deux mois.
- Lorsque le salarié en CDD est protégé par un mandat, l’employeur doit saisir l’inspection du travail au moins 1 mois avant la fin du CDD pour qu’elle autorise la cessation du contrat.
- La loi Rebsamen élargit les règles d’utilisation des heures de délégation attribuées au délégués syndicaux afin qu’ils participent à des travaux de branches ou interprofessionnels autre qu’au niveau de l’entreprise.
Les nouveautés relatives aux contrats de travail La loi apporte de nombreuses nouveautés concernant le CV anonyme, le CDD, le CDI intérimaire, l’apprentissage et le contrat de professionnalisation.
- La loi supprime le caractère obligatoire du CV anonyme qui avait débuté en 2006 avec la loi sur l’égalité des chances. Il était obligatoire pour les entreprises de 50 salariés et plus. Le CV anonyme devient ainsi facultatif.
- Les employeurs pourront signer 3 CDD. Ainsi, le CDD pourra être renouvelé deux fois au lieu d’une sans que la durée maximale ne dépasse 18 mois. Les contrats de mission sont également concernés.
- Le CDI intérimaire qui est entré en vigueur en mars 2014 est encore peu utilisé par les entreprises. La loi Rebsamen précise que la durée maximale des contrats sera de 36 mois et garantie une rémunération minimale.Cette garantie de rémunération ne peut être inférieure aux planchers suivants :
- un smic à temps plein pour les ouvriers et employés
- 115% du smic à temps plein pour les agents de maîtrise et les techniciens
- 125% du smic à temps plein pour les cadres.
Plus de précisions sur ce contrat seront apportés en 2018.
- Concernant les contrats d’apprentissage, la loi Rebsamen modifie les conditions requises pour bénéficier de l’aide au recrutement d’un apprenti et la période pendant laquelle le contrat peut être rompu sans justification.Les contrats d’apprentissage conclus depuis le 1er juillet 2014 peuvent ouvrir droit à une aide de la région de 1 000€.Pour en bénéficier il faut avoir moins de 250 salariés.Il faut aussi à la date de conclusion du contrat ne pas avoir employé d’apprentis depuis le 1er janvier de l’année précédente ou si un ou plusieurs apprentis sont déjà présents justifier que le nombre d’apprentis présents est supérieur à celui relevé au 1er janvier de l’année en cours.A partir de juillet 2015, il fallait aussi remplir une condition supplémentaire : relever d’un accord de branche comportant des engagements en faveur de l’alternance, notamment des objectifs chiffrés en matière d’embauche. Cette dernière condition est supprimée par la loi Rebsamen.Les contrats d’apprentissage peuvent être rompus pendant la période d’essai soit les 2 premiers mois. Pour les contrats conclus depuis le 18 août 2015, cette période d’essai n’est plus de deux mois. Elle durera 45 jours, consécutifs ou non, de formation pratique dans l’entreprise.Cette mesure vise à mieux juger l’apprenti sur le temps réellement passé dans l’entreprise.
- Concernant les contrats de professionnalisation, la loi modifie les bénéficiaires de ce contrat et permet à ceux-ci de travailler dans plusieurs entreprises.Il existe deux types de bénéficiaires : les jeunes âgés de 16 à 25 ans et les demandeurs d’emploi âgés de 26 ans et plus. Le contrat est maintenant ouvert aux chômeurs inscrits depuis plus d’un an sur la liste des demandeurs d’emploi. Le gouvernement parle ainsi de contrat de professionnalisation « nouvelle chance ».Il existe aussi et toujours le contrat de professionnalisation adapté.De plus, la loi prévoit que les bénéficiaires puissent acquérir leur savoir-faire dans plusieurs entreprises via la conclusion d’une convention spéciale entre l’employeur, le salarié et les entreprises d’accueil.
Les mesures relatives à la santé des salariésLa loi aborde différentes problématiques sur la médecine du travail, l’inaptitude professionnelle, le burn-out, la pénibilité.
- Lorsque le médecin du travail précise que le maintien du salarié dans l’entreprise serait gravement préjudiciable pour sa santé, l’employeur n’est pas tenu de rechercher un reclassement. Il s’agit là d’une exception à l’obligation de reclassement en cas d’inaptitude professionnelle.C’est ce maintien dangereux pour la santé du salarié qui constitue le motif du licenciement.
- La loi supprime la fiche pénibilité et la remplace par une simple déclaration via la DADS ou la DSN. Ainsi les employeurs ne seront plus obligés de consigner les facteurs d’exposition de chaque salarié mais devront simplement remplir une déclaration annuelle dématérialisée.Toutes les informations contenues dans cette déclaration sont confidentielles.C’est sur la base de cette déclaration que des points sont attribués au compte pénibilité.Il sera également mis en place un référentiel homologué par les branches professionnelles où seront définis les postes, métiers ou situations de travail exposés à la pénibilité.
- Avec la loi Rebsamen, le rôle de prévention du médecin du travail est renforcé, de même que ses moyens d’action.Le médecin du travail doit veiller à éviter toute altération de la santé des salariés du fait de leur travail.Il doit aussi prévenir toute atteinte à la sécurité des tiers.Les moyens d’action sont de fait étendus : le médecin peut suggérer des mesures individuelles telles que mutations ou transformations de postes ; il peut aussi proposer à l’employeur l’appui de l’équipe pluridisciplinaire du service de santé au travail ou d’un organisme compétent en matière de maintien dans l’emploi.Ainsi la médecine du travail se veut plus proche des postes à risques.Par ailleurs, en cas de recours devant l’inspection du travail d’une décision du médecin sur l’inaptitude d’un salarié, l’autre partie devra être obligatoirement informée. Ainsi si l’employeur conteste, le salarié devra être informé et vice versa.Concernant la surveillance médicale renforcée (SMR) des salariés, la loi l’étend aux salariés affectés à des postes présentant des risques particuliers pour leur santé ou leur sécurité, celles de collègues ou de tiers de même qu’à ceux dont la situation personnelle le justifie. Rappelons que la SMR concernait jusqu’à présent que les salariés âgés de moins de 18 ans, les femmes enceintes, les travailleurs handicapés, et les salariés exposés à des dangers (amiante ; plomb ; bruit ; …).
- La loi Rebsamen ouvre la voie à une meilleure reconnaissance des pathologies psychiques comme maladies professionnelles. Le burn-out ne sera pas inscrit au tableau des maladies professionnelles mais la question reste en débat. Un rapport sera remis le 1er juin 2016.
Quelques autres mesures
- La base de données économiques et sociales (BDES) va comporter dès l’année prochaine une nouvelle rubrique portant sur l’égalité professionnelle en plus des 8 déjà existantes.
- La loi Rebsamen va rentrer dans le Code du travail la notion d’agissements sexistes. Jusqu’alors la notion de sexisme n’existait pas dans le Code du travail. Pourtant 80% des femmes salariées considèrent qu’elles sont régulièrement confrontées à des attitudes ou à des décisions sexistes et 93% estiment que ces attitudes peuvent amoindrir leur sentiment d’efficacité.
- Mise en place à partir de 2017 d’un compte personnel d’activité qui regroupera et centralisera tous les comptes et les droits des salariés : formation, compte pénibilité, compte épargne-temps, droits au chômage et mutuelle.
- La loi facilite la négociation d’un accord collectif. En l’absence de délégués syndicaux dans l’entreprise, les représentants du personnel pouvaient négocier et conclure des accords collectifs de travail. Cette possibilité réservée aux entreprises de moins de 200 salariés est maintenant par la loi Rebsamen étendue à toutes les entreprises.
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